Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
21 octobre 2013 1 21 /10 /octobre /2013 10:07

Particulièrement saisissantes, ces deux photographies de grand format de Mathieu Pernot sont plus que jamais d'actualité.

Nous avons trouvé intéressant que le sujet du sommeil et du rêve ne se limite pas à ses aspects purement oniriques et poétiques, et ce type d'incursion dans le politique me semble particulièrement intéressant. J'ai aimé l'idée que pour l'artiste, la seule et dernière liberté de ces hommes, la seule chose insaisissable, était ce sommeil, dont la forme visible laisse dans le même temps penser à la mort violente de ces migrants échouant chaque jour non loin de nos côtes, dans la fatalité d'un espoir de vie meilleure.

 

migrants-pernot-copie-1.jpg

 

MATHIEU PERNOT

« Les migrants »

2 photographies couleur, tirage lambda, contrecollé sur aluminium et encadré, 95 x 135, édition de 5 pour chaque, 2009

Collection Jean-Paul Chatenet - Courtesy Galerie Eric Dupont, Paris

 

Les deux photographies présentées ici sont issues de la série  « Les migrants ».  Réalisée à Paris, dans le 10èmearrondissement, très tôt un matin de l’été 2009, elles montrent des formes humaines, emmaillotées et cachées dans des draps, des tissus, des sacs de couchage de fortune, à même un banc, le bord du square dont ces hommes viennent d’être expulsés, un carton posé sur le trottoir. Ce sont des migrants afghans, réfugiés clandestins, pour qui même le sommeil, cette nécessité vitale, est devenu un combat : trouver où et comment dormir, se cacher, s’abstraire un moment d’un monde qui, dit Mathieu Pernot, « ne veut plus les voir ». A la fois présents et absents,  « invisibles, silencieux et anonymes », ces hommes endormis, recouverts de ce qu’on pourrait presque prendre pour des linceuls, rendent ces images violentes et ambigües. Elles rappellent d’autres images, celles de corps sans vie dans les états de guerre. L’artiste confie : « J’ai été ému par la présence de ces "refoulés" de l’histoire, ces figures d’une mondialisation inversée. Leur façon d’occuper l’espace évoquait la figure tragique du charnier. J’ai été troublé par la beauté́ ambigüe de ces formes qui rappelaient celles d’une autre Histoire. J’ai pensé que la meilleure image à faire était celle de leur sommeil, de cet ailleurs que l’on ne connaitra jamais et qui constitue sans doute leur dernière échappée. Je n’ai pas voulu les réveiller. Je n’ai rien vu des migrants ».

 

Le travail de Mathieu Pernot s’inscrit dans la tradition d’un art politique nourri d’histoire et de sociologie. L’artiste procède par séries qui sont autant de points de vue analytiques et successifs sur les grandes questions politiques et sociales de l’identité et de la mémoire, de l’aliénation et du progrès. Se référant aux travaux de Michel Foucault, il définit lui-même son travail comme « monumentaire » ou « documental », s’inscrivant dans le champ des sciences humaines. « J’essaie », explique Mathieu Pernot, « de trouver une forme à l’histoire et je me nourris autant d’ouvrage de sociologie, d’anthropologie ou de philosophie que de livres d’art contemporain. La question n’est pas tant de savoir ce qu’une démarche artistique peut apporter à un travail scientifique et inversement mais d’essayer de produire un nouvel objet qui traverse les disciplines. »

Il s’est ainsi intéressé, dans une réflexion récurrente sur l’architecture dans son rapport au vivant humain, à l’histoire du camp de concentration tsigane de Saliers, au monde carcéral,  à la destruction de barres d’immeubles en banlieue, triomphe de l’urbanisme des années 70 et symbole aujourd’hui de la fin de l’utopie du modernisme.

 

 

(texte extrait du catalogue, parution à l'occasion de l'exposition)

 

 

 

"Au-delà de mes rêves" - Du 26 octobre au 23 février 2013

 

Commissariat: Marie Deparis-Yafil et commissariat général: Fabrice Bassemon et Magali Briat-Philippe

 

 

 

H2M - Espace d'Art Contemporain

 

Hotel Marron de Meillonnas

 

5 rue Teynière

 

01000 Bourg-en-Bresse

 

Exposition ouverte du mercredi au dimanche de 13h à 18h

 

Entrée libre

 

 

 

et

 

 

 

Monastère royal de Brou

 

63 boulevard de Brou

 

01000 Bourg-en-Bresse

 

Exposition ouverte tous les jours de 9h à 12h et de 14h à 17h

 

Entrée payante

 

 

 

Catalogue de l'exposition disponible aux boutiques du Monastère et sur demande par correspondance.

 

(sauf 1er novembre, 25 décembre et 1er janvier)

 

 

 

Exposition labellisée Résonance de la Biennale de Lyon 2013

 

 

 

Avec le soutien de:

 

Ministère de la Culture, Région Rhônes-Alpes, Conseil Général de l'Ain

 

En partenariat média avec Télérama

 

 

 

Sur une initiative de

 

Musée de France, Ville de Bourg-en-Bresse / Chemins de la Culture, Centre des Monuments Nationaux

 

Partager cet article
Repost0

commentaires