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21 août 2011 7 21 /08 /août /2011 11:49

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“Spasmes et douleurs” - 1mx2m, sanguine, crayons de couleur, acrylique et encre sur toile, préparation, gesso, fil électrique, douille en porcelaine mate, ampoule, 2011 

 

« Spasmes et douleurs », issu d’une série autour des douleurs féminines, se présente comme une sorte d’installation aux ambitions sculpturales, dans cet impressionnant format, qui renforce la profondeur et la densité charnelle du dessin, soutenu avec force et simplicité par cette installation lumineuse, clin d’œil à l’univers baconien, qui, mieux que personne, a su saisir la dimension intrinsèquement poignante de la condition humaine.

 

L’œuvre dessinée de Sandra Krasker s’inscrit dans une recherche particulièrement contemporaine sur ce qui anime le corps, non pas tant dans la forme générique du corps humain, mais dans ce qui en constituerait un portrait possible.

 

Sandra Krasker entend saisir une vérité du modèle, une vérité sous-jacente, perceptible dans un regard, une attitude, un geste… Il s’agit pour elle de  privilégier la saisie de l’émotion, du vécu, du ressenti, une forme de beauté qui n’est pas celle, académique, de parfaites proportions, mais qui a à voir avec ce qui transparaît de l’humain, ce qui en fait la beauté, en somme, réévaluant ainsi le sens de la « figuration ».

Car derrière cette sorte de perfection classique de la ligne, ce n’est pas le corps qu’elle dessine mais c’est à travers lui, parce qu’il est enveloppe et support nécessaire, la saisie d’une intériorité implicite, le choix de la vulnérabilité de la chair à la fois que de sa puissance, une certaine forme de véracité au-delà, ou en deçà de la matière. Bien que les hommes et les femmes que dessinent Sandra Krasker soient le plus souvent partiellement nus, l’artiste ne se situe pourtant pas dans la crudité de Freud par exemple, car si elle exprime la réalité concrète de la chair, il n’y a ici ni volonté de violenter l’intimité du corps ni véracité inquisitrice mais bien plutôt un appel à l’autre, à la rencontre et à la sollicitude, pour s’inspirer de thèmes chers à Emmanuel Levinas. Et sous l’apparent académisme d’une citation néo-classique, perce alors une authentique modernité, nourrie d’une réflexion sans concession sur la question du traitement de la figure humaine, à la recherche d’une part de vérité de l’humain contemporain, tant dans son rapport au corps que dans ses désarrois perceptibles.

 

Si Sandra Krasker ne tombe pas dans l’empathie avec son modèle, ou dans un expressionnisme de premier degré, elle n’a pas non plus le regard du biologiste, ni ne pose la distance, la neutralité du dessin d’anatomie. Elle maintient ainsi sans cesse une sorte d’ambiguïté entre le souci de réel et la puissance émotionnelle et charnelle qui se dégage de ses esquisses. Le « sous la peau », l’organique presque, le besoin de sentir les palpitations de la vie, le sang qui coule dans les veines, la chair dans son dénuement, sa fragilité concrète, sa complexité aussi, bref, tout ce qui donne sa valeur intrinsèque et inaliénable à l’humain, à l’heure où le cynisme l’emporte parfois sur la vie.

Bien entendu, apparaissent en filigrane les questions, fondamentales, de la précarité de la vie, de la corruption et de la mort. Mais il semble qu’il y ait avant tout chez Sandra Krasker une émotion  réelle face aux déploiements de la vie, à l’existence même. Sous l’âpreté de son trait,  contrastant avec la douceur de son regard,  et la peinture qui coule, manifestant discrètement la mobilité et la déliquescence des choses et des êtres, l’œuvre montre l’humain en situation dans le monde, avec ses faiblesses et sa corruption, émotionnelle mais sans pathos.

 

Photo:

“Spasmes et douleurs”, détail, 2011

 

 

« Sutures »

Galerie Charlotte Norberg- Du 1er au 24 septembre 2011

74 rue Charlot- Paris 3ème

Vernissage le 1er septembre à partir de 18h, en présence des artistes

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