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3 février 2016 3 03 /02 /février /2016 13:20
The Family VIII 9+2 EA - Photographie - Tirage chromogénique marouflé sur dibond - 225 x 180 cm- 2008- Courtesy Galerie Guy Bärtschi, Genève – Inv. GB 04511

The Family VIII 9+2 EA - Photographie - Tirage chromogénique marouflé sur dibond - 225 x 180 cm- 2008- Courtesy Galerie Guy Bärtschi, Genève – Inv. GB 04511

Les deux photographies présentées dans l'exposition sont issues de la série The Family, édité dans le cadre d'un projet caritatif dirigé par France Morin*.

Marina Abramovic se rendit à Louang Prabang, au Laos, une première fois en 2006. Là-bas, elle y observa de nombreux enfants jouant à la guerre avec des armes jouets, ce qui la conduisit à se demander quelle violence les enfants engageaient ainsi dans leurs divertissements. Elle s'intéressa alors aux images violentes diffusées dans les médias des guerres civiles qui émaillent l'histoire du Laos depuis des décennies, spectacle lui semblant en contradiction avec l'atmosphère mystique de la ville, connue pour ses centaines de temples bouddhistes et de monastères. Elle commença alors la série The Family, dans un studio de photographie local, ainsi qu'un film, Dangerous Games, mettant en scène des enfants faisant – ou jouant à – la guerre.

Il y a bien sûr une dimension critique et politique dans ces oeuvres, dénonçant la violence de la guerre et questionnant la situation des enfants-soldats partout dans le monde. Mais il faut aussi considérer l'oeuvre avec une certaine tendresse, saisir le contraste extrême entre la violence induite par la présence des armes et le sentiment de tendresse face à l'innocence des enfants, qu'on aimerait pouvoir préserver. Ce petit théâtre de la cruauté est, d'une manière plus tendre que, par exemple, dans la performance Balkan Baroque**, une manière de réagir avec émotion “au sentiment de honte énorme face à cette guerre” que fut la guerre de Bosnie-Herzégovine. Et un appel à une forme d'universalité de l'amour, ne serait-ce que celui qu'elle n'a jamais connu, enfant, dans les bras de sa mère.

Car si la série s'intitule "The Family", ce n'est pas tant dans l'ironie que dans les souvenirs d'enfance et l'histoire de l'artiste qu'il faut en chercher le sens. "Je pense à mes parents", explique l'artiste à propos de cette série, "qui étaient le plus souvent en uniforme pendant la journée, et qui le soir dormaient avec des armes à proximité ou sous le lit". Née à Belgrade dans un pays qui n'existe plus, les premières oeuvres-performances de Marina Abramovic furent ainsi à la fois des actes de rébellion contre la sévérité de l'éducation qu'elle a reçu, la culture de la répression de la Yougosalvie de Tito – que représentaient ses parents en tant que héros nationaux et partisans- et des "rituels de purification" et de libération de son lourd passé.

* Le commissaire indépendant Frances Morin, au travers de l'organisation “A Quiet in the Land”, organise des projets sous la forme de collaborations à long terme entre des artistes et des communautés dans le monde.

**En 1997, lors de la Biennale de Venise, Marina Abramovic réalise Balkan Baroque, une performance dans laquelle, assise au sol, elle nettoie et décharne 1500 os de bœufs enrobés de chairs, en fredonnant des chants populaires serbes.


 

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